soleil. 20 avril 2025

Paris se souvient du mensonge qui a alimenté l'antisémitisme : Dreyfus, symbole de la vérité

Capitaine Alfred Dreyfus Photo : Wikimedia Commons Domaine public

Plus de 130 ans après l'affaire qui a changé l'histoire de France et alimenté l'antisémitisme en Europe, une exposition à Paris commémore Alfred Dreyfus, le capitaine juif français faussement accusé de haute trahison et emprisonné pendant cinq ans, comme un symbole moderne de vérité.

Le Musée d'art et d'histoire du Judaïsme de la capitale française accueille depuis cette semaine l'exposition intitulée « Alfred Dreyfus ». "Vérité et Justice", vingt ans après la dernière exposition consacrée à cette affaire judiciaire et politique qui a divisé et choqué la société française.

Avec une forte ambition esthétique et historique, l’exposition accorde davantage d’attention au contexte historique, à l’influence ultra-nationaliste de l’époque, et présente, comme nouveauté, la voix à la première personne d’un personnage racontant son histoire comme fil conducteur.

"Nous donnons à Dreyfus une nouvelle dimension, à la fois historique et humaine", explique Isabelle Cahn, l'une des commissaires de l'exposition, ajoutant qu'au cours de ces vingt années, ils ont appris davantage de détails sur les "machinations" derrière l'affaire et sur son premier avocat.

Ces nouveaux documents font partie de la soixantaine de documents du fonds qui, avec les objets et œuvres d'art, totalise 250 pièces provenant à la fois de ses propres archives et du musée d'Orsay, et, dans une moindre mesure, des Archives nationales, de la Bibliothèque nationale de France, du musée de l'Armée et du musée Carnavalet.

Ce musée fait revivre cette affaire, qui fut l'un des germes du mouvement sioniste, à l'heure où l'antisémitisme a pris de l'ampleur en Europe et en France suite aux attentats terroristes du Hamas contre des communautés du sud d'Israël en octobre 2023.

À la première personne

Au fil d'une douzaine de salles, Dreyfus raconte sa vie de manière chronologique, entrecoupée du contexte d'une République française affaiblie après sa défaite dans la guerre franco-prussienne et au bord de la Première Guerre mondiale.

Le soldat juif, né en Alsace, région cédée à l'Allemagne lors de l'armistice de Versailles, souhaitait conserver la nationalité française comme sa famille et s'engagea dans l'armée par fervent sentiment patriotique.

En 1894, une cour martiale le reconnut coupable d'espionnage au profit de l'Allemagne, au cours d'un procès entaché d'irrégularités incompréhensibles, malgré le mouvement nationaliste, raciste et antisémite croissant en France et dans d'autres pays européens à la fin du XIXe siècle.

Sur une affiche des élections législatives de 1889, cinq ans plus tôt, qui fait partie des près de 250 objets et documents exposés, on peut lire l'un des slogans antisémites qui proliféraient alors en France : « Les Juifs ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »

« Nous évoquons le contexte historique de l’antisémitisme de la fin du XIXe siècle, qui est un antisémitisme racial », souligne Cahn.

L'exposition rappelle que cette affaire fut l'une des raisons qui ont conduit le journaliste autrichien Theodor Herzl, qui a suivi le procès, à promouvoir le concept de sionisme, la création d'un État juif sur la Terre d'Israël (Eretz Israël).

Avant d'être emprisonné en Guyane, Dreyfus fut dépouillé des galons et des insignes de son uniforme d'officier lors d'une cérémonie humiliante sur la place d'armes de l'École militaire, sous les yeux du public et des lecteurs des journaux dont les originaux sont visibles dans l'exposition.

Bien que ni Dreyfus lui-même ni sa famille ne cessèrent de clamer son innocence et de demander la réouverture du dossier, ce n'est qu'avec l'acquittement du véritable coupable de trahison, le commandant d'origine hongroise Ferdinand Walsin Esterharzy, qu'une forte réaction se déchaîna parmi les intellectuels et l'opinion publique française.

En janvier 1898, l'écrivain Émile Zola publie dans le journal L'Aurore une lettre au président de la République, Félix Faure, dans laquelle il dénonçait la conspiration de l'institution militaire pour accuser le soldat juif sur la base de fausses preuves qui ont ensuite été dissimulées pour améliorer son image.

L'exposition, qui sera ouverte jusqu'en juillet, présente un exemplaire original de la célèbre œuvre de Zola, intitulée « J'accuse », qui, après avoir été vendue à plus de 300.000 XNUMX exemplaires, a déclenché une bataille dans l'opinion publique française, où « dreyfusiens » et « anti-dreyfusiens » s'affrontent dans la presse, la littérature, la rue et sur l'affichage populaire.

Bien que le président ait finalement gracié Dreyfus et qu'il ait rejoint l'armée française, la plus grande préoccupation du soldat a toujours été l'atteinte à son honneur et au souvenir qui resterait de son nom, puisque la fausse étiquette de « traître » ne l'a jamais quitté.

Aujourd'hui, dans un climat de post-vérité et de fake news, ce musée parisien commémore l'impact de l'affaire Dreyfus sur le cinéma et l'imaginaire populaire, et reflète le danger et la portée des mensonges qui, alimentés par des idées haineuses, continuent de résonner aujourd'hui.

« Dreyfus a été accusé de trahison principalement parce qu’il était juif », réitère Cahn. EFE et Aurora

3 réflexions sur « Paris se souvient du mensonge qui a alimenté l'antisémitisme : Dreyfus, symbole de vérité »
  1. Alors qu'il semblait que l'antisémitisme médiéval et l'antisémitisme qui lui a immédiatement succédé, celui de l'Inquisition espagnole, avaient été dépassés ou qu'ils étaient des phénomènes arriérés, l'antisémitisme relativement récent, plus criminel, ne commença pas tant avec les criminels nazis allemands ; le juif stéréotypé de l'Allemagne nazie apparut également dans le journal antisémite français La libre parole, fondé en 1892 par le célèbre antisémite Édouard Drumont. La Libre Parole participa à la campagne antidreyfusarde, entre autres, jusqu'en 1924, date à laquelle elle cessa de paraître. Elle publia également une traduction des Protocoles des Sages de Sion. L'un des meilleurs livres pour tenter d'expliquer ce qui se passait lors de la nouvelle résurgence de l'antisémitisme à cette époque, à la fin du XIXe siècle, est « Sur la question juive » (2011) d'Elisabeth Roudinesco, une psychanalyste française bien connue, juive d'origine roumaine. Bien que l’auteur soit de gauche, en tant que lacanien, ce n’est pas une lecture qui semble communiste ou psychanalytique alambiquée, mais plutôt une grande connaissance. La discrimination traditionnelle des juifs, de nature plus religieuse, se serait transformée en haine viscérale vers le milieu du XIXe siècle, précisément dans la France cultivée et éclairée. Il était surprenant qu'il y ait en France autant d'intellectuels antisémites ou ceux qui ont collaboré, fournissant involontairement un argument supplémentaire aux antisémites, de plus, ceux qui ont rejoint la cause étaient de gauche ou de droite, ou athées, catholiques. , protestants, ou beaucoup d'entre eux étaient des juifs qui renonçaient à être juifs. Ils se contredisaient souvent ou utilisaient les arguments de chacun même s'ils avaient des idéologies incompatibles ; leur seul lien commun était l'antisémitisme. D'autres fois, ils ont manipulé en réinterprétant à leur manière des écrivains très populaires comme Victor Hugo, ou Nietzsche lui-même, alors qu'en réalité il critiquait durement les antisémites et ceux qui utilisaient ses livres pour justifier la haine des Juifs, ou celui qui est pris pour son meilleur ami était le Juif Paul Rée, parfois on peut même lire des spéculations selon lesquelles ils étaient amants ou qu'ils avaient un trio au-delà du simple intellectuel avec l'écrivain Lou Andreas-Salomé, ou le critique et philosophe danois George Brandes était également juif, qui contrairement aux rara avis mentionnés par Roudinesco, ne semble pas pouvoir jeter des pierres sur son propre toit, c'est-à-dire contre les Juifs. Bien que le nihilisme ait cette curieuse caractéristique que chacun le réinterprète à sa guise, ce ne sont pas seulement les fascistes et les nazis perturbés, ou le manque alarmant d’éducation et de culture qui provoquent les délires de ce qui n’est que philosophie ou tout au plus culture ou art, comme Nietzsche lui-même aurait bien pu prétendre l’avoir défini. Mais, tout comme le nihilisme de Nietzsche, ils s'en sont pris aux Juifs, ils les ont atteints, de la même manière qu'ils auraient pu se cogner la tête contre les murs ou sucer des ampoules électriques, et il n'y avait aucun moyen de leur sortir ça de la tête.

  2. Dans le cas de l'antisémite français Drumont, selon l'auteur, son livre « La France juive » fait toujours partie de « la trilogie de la haine » avec « Mein Kampf » et « Les Protocoles des Sages de Sion » d'Hitler. Hitler serait celui qui pousserait à l'extrême ou réaliserait le vœu de tout cet antisémitisme né dans la France cultivée, même si la majorité des Français n'avaient en principe pas de tels objectifs criminels, ils étaient plutôt intellectuels ou théoriques. Il est tout aussi surprenant qu’aujourd’hui, au XXIe siècle, même avec Internet et tant de progrès, ces idées anachroniques aient leur place, répétant les mêmes arguments absurdes sans aucun fondement. La France est passée du pays des Lumières, de la Révolution, de la République et de la démocratie, à être entraînée par cette bande de réactionnaires, de monarchistes absolutistes, d'ultranationalistes, de racistes catholiques et chrétiens, ramenant la France dans le temps à un moment de l'histoire qu'ils considéraient comme idéal, dans le cas de la France au Moyen Âge, comme les fascistes et les nazis espagnols, bien que ces fous espagnols fassent également de nombreux autres sauts spatio-temporels, probablement avec une technologie extraterrestre, copiant d'autres amis, y compris des voyages dans la Rome antique, ou à l'époque celtique des sorcières ou des druides de leur race aryenne supérieure des Galiciens, ou sûrement beaucoup d'autres vont sur d'autres planètes ou sur la Lune où, selon certains parmi les plus perturbés, les nazis allemands résident et ont des OVNI, c'est juste que les pouvoirs démocratiques actuels le gardent caché au monde avec leur grand pouvoir de manipulation. Selon Roudinesco, « bien qu'il se proclame européen dans sa croisade contre les juifs, Drumont qualifie de juif tout ce qui n'est pas « français ». Les immigrés sont donc juifs. Mais ce n'est pas assez. Pour qu’un non-juif soit assimilé à un juif, il devra être soit franc-maçon, soit athée, soit républicain, soit protestant, soit jacobin. Ainsi, Cambacérès est considéré comme juif car il se considère franc-maçon, et il en va de même pour Léon Gambetta, car il est républicain et d'origine italienne. Par l'effet de ce raisonnement, la France fut « judaïsée » de tous côtés, puisque, à cause de Voltaire et de l'abbé Grégoire – le premier pour son antichrétien, le second pour son apostasie –, les Juifs prirent le pouvoir sur tout grâce à leur émancipation. Par ce dernier terme, il désigne la tendance des Juifs de l'époque à s'intégrer aux sociétés laïques des États européens, à s'habiller et à se comporter comme les Européens du pays, allant jusqu'à se permettre le luxe d'être athées. L'émancipation était soit une coutume courante parmi les Juifs, soit une mise à jour de l'époque qui a finalement rendu les choses encore pires pour eux par rapport aux persécutions que les Juifs avaient subies auparavant en Europe. Les fascistes et les nazis d'aujourd'hui ne sont pas différents de ces criminels qui ont mené l'Europe au bord du gouffre, ceux qui ont balayé toutes les valeurs européennes par-dessus bord. Cela leur importait peu, car eux, avec leurs idéologies et leurs croyances, étaient au-dessus de tout. Pour atteindre leurs objectifs fondamentalistes, les moyens importaient peu. Elisabeth Roudinesco évoque dans son livre non seulement les origines de l'antisémitisme, mais aussi du négationnisme ou de l'assimilation de l'antisionisme à l'antisémitisme, qui unit diverses idéologies apparemment antagonistes : les islamistes qui soutiennent les groupes terroristes arabes, les fascistes, les néo-nazis, les gauchistes, les anarchistes, etc., par exemple le célèbre gourou de gauche Noam Chomsky est un fervent antisioniste qui a écrit le prologue d'un livre de l'antisémite Robert Faurisson, le livre qui a donné naissance au négationnisme le plus moderne ou à sa justification intellectuelle. Il ne faut pas oublier que les communistes et les anarchistes, partout dans le monde et même en Espagne, ont non seulement tendance à croire toutes les absurdités que débite Chomsky, mais ils ont aussi tendance à répéter la conspiration mondiale des Juifs et des judéo-maçonniques, par exemple à travers des sectes secrètes comme le tristement célèbre Club Bilderberg. Les communistes sont peut-être davantage axés sur la domination économique mondiale, tandis que les fascistes et les nazis, voire les ultra-catholiques, aiment tout mélanger dans ces mêmes conspirations. Autrement dit, ils mêlent argent et contrôle politique, contrôle de la santé de la population et contrôle mental par les produits pharmaceutiques, ainsi qu'avec l'occultisme et les pouvoirs paranormaux, ou encore avec les enlèvements, les orgies, les viols et les sacrifices d'enfants au service du culte du Diable.

  3. Le profond nationalisme d’exclusion de la France du XXIe siècle, et jusqu’à au moins la première moitié du XXe siècle, a produit un racisme si intense que l’antisémitisme, malgré toute sa cruauté, n’est que la pointe de l’iceberg. Personne, à part les Français, n'était épargné par le fromage Gruyère, y compris ses trous.

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